[Interview] V.Bernaud : "Développer les synergies entre lycées professionnels et CFA"

Publié le 28/03/2017

Vincent Bernaud est secrétaire national à la fédération SGEN-CFDT, en charge du dossier de l’apprentissage.

L’apprentissage est souvent présenté, en fin de 3e, comme un « repoussoir ». Qu’en penses-tu ?
Cela correspond à la vision très française de l’école et des métiers. Il faut savoir que l’apprentissage ne fait pas partie des procédures d’orientation de l’Éducation nationale. C’est un choix qui appartient aux familles seules. Du coup, les élèves qui voudraient choisir l’apprentissage manquent cruellement d’accompagnement, en particulier pour la recherche d’employeurs.

Quel regard portes-tu sur l’alternance école-entreprise ?
Nous y sommes très favorables. Les jeunes devraient pouvoir, dans leur parcours, suivre leur formation sous un statut scolaire et la poursuivre sous un autre. L’apprenti dont le contrat de travail est rompu devrait pouvoir réintégrer un parcours de formation à temps plein. On sent bien aussi qu’il y a des jeunes qui, en fin de 3e, ne sont pas prêts pour intégrer le monde de l’entreprise. Il faudrait réfléchir à des premières années de formation à temps plein qui puissent se poursuivre sous un statut d’apprenti. Globalement, il faut développer les synergies entre lycées professionnels et CFA. Si les formations pouvaient avoir lieu sur un même lieu géographique, ce serait déjà un obstacle en moins. Pour les jeunes en apprentissage, il est essentiel de faciliter la relation entre tuteurs et enseignants et de développer des évaluations conjointes en posant clairement les objectifs de progression pendant la période en entreprise et en prenant en compte ce que le jeune a vécu dans l’entreprise quand il revient en classe. Car c’est quand les jeunes sentent une cassure entre ce qu’ils font dans l’entreprise et à l’école qu’il y a un risque accru de décrochage.

Qu’en est-il des personnels enseignants des CFA ?
Comme l’apprentissage et la formation initiale à temps plein n’ont pas les mêmes sources de financement (Conseil régional d’un côté et État de l’autre), il est difficile pour les enseignants titulaires de l’Éducation nationale d’effectuer une partie de leur « service » en CFA. Du coup, les enseignants de CFA sont souvent des contractuels ou des vacataires qui exercent dans des conditions parfois précaires. Cela renvoie aux titulaires une image négative de l’apprentissage, ce qui est une source de blocage supplémentaire pour son développement. Nous sommes favorables à des « services mixtes », où les enseignants pourraient intervenir en formation initiale et en apprentissage. Cela enrichirait aussi le métier d’enseignant.