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[Portrait] Marie-Jocelyne, d’un métier à l’autre

Publié le 03/07/2020

Marie-Jocelyne Hervé est cheffe de file de la commission paritaire régionale « Transition pro » (ex-Fongecif). Un mandat au cœur du système de la formation professionnelle et en lien avec ses autres engagements pour aider les salariés à rebondir dans leur carrière.

Enfant du Pays basque, d’où elle garde un léger accent chantant, Marie-Jocelyne a grandi avec des rêves de nouveaux horizons plein la tête. Marin de commerce, son père pouvait partir en mer pour de longues périodes. « Il naviguait jusqu’à l’océan indien. Le cap de Bonne-Espérance, Antananarivo... Il envoyait des lettres avec des timbres magnifiques qui mettaient des semaines à nous parvenir », se remémore-t-elle. De ses aventures, son père leur rapporte des histoires. Mais il en gardera aussi des séquelles. « Les conditions de travail étaient parfois extrêmes, souligne Marie-Jocelyne. Il a perdu la vue à la suite d’une crise de glaucome qui s’est produite à la Réunion ».

De la chimie aux télécoms

Après son bac obtenu à Bayonne, elle s’oriente vers des études scientifiques à Pau. « J’étais bonne en sciences et je me suis donc lancée dans la chimie théorique », explique-t-elle. Travailleuse, Marie-Jocelyne ira jusqu’au doctorat. Si elle envisage un temps de s’orienter vers la recherche en laboratoire, elle suit finalement une autre voie. « La période était compliquée pour la recherche. Je suis donc montée à Paris au début des années 90. C’est là que j’ai été recrutée par Alcatel comme ingénieure informatique. J’étais habituée aux algorithmes et, à l’époque, les entreprises embauchaient moins sur le diplôme que sur le niveau d’études et elles nous formaient ensuite ». Après une formation dans les télécommunications de quatre mois, Marie-Jocelyne se met ainsi à développer des logiciels pour l’entreprise.

Très vite, elle devient aussi bénévole pour le Comité d’entreprise (CE) et se fait repérer par la CFDT, qui l’inscrit sur sa liste aux élections. Élue, Marie-Jocelyne se voit désignée – sans transition ! – présidente de la commission emploi-formation du CE. Elle travaille alors sur le bilan et les orientations stratégiques de l’entreprise ou encore le suivi des plans de sauvegarde de l’emploi, comme après le rachat d’Alcatel par Nokia. « Un moment difficile, reconnaît-elle. On se rend compte que partir avec de l’argent, c’est bien, mais l’essentiel reste d’avoir un projet professionnel ».

La formation comme moteur

Elle prend ainsi conscience que la formation constitue un véritable levier d’action syndicale. « Ça a toujours été mon truc, assure-t-elle. Pour les salariés, en particulier à bas niveau de qualification, ce n’est pas simple de s’y retrouver car il existe différents dispositifs et financeurs ». Après une réunion à l’Union régionale Île-de-France sur la formation, elle est mandatée au Fongecif et y rencontre Pierre Divet, chef de file de la CFDT (décédé en mai dernier, voir p. 5). « Pierre a été un mentor pour moi », lâche-t-elle, les yeux embués par l’émotion.

Pour gagner en aisance, elle suit une formation de coach. Elle y apprend qu’« il faut parfois savoir simplement écouter les salariés. Être disponible. Les amener à formaliser leur questionnement, exprimer leurs besoins et éclaircir les choses. Nous n’apportons pas une solution sur un plateau », résume-t-elle. À côté de son mandat, Marie-Jocelyne assure également des permanences sur la formation professionnelle pour la CFDT Île-de-France à destination des adhérents.

Aujourd’hui, l’ingénieure réalise des tests d’intégration sur la 5G tout en continuant de représenter les salariés en tant que présidente de la commission centrale emploi-formation. Au niveau interprofessionnel, elle est devenue en janvier cheffe de file de la nouvelle structure régionale « Transition pro », qui reprend une partie des prérogatives du Fongecif et est chargée de l’identification des besoins en matière d’emploi et de compétences, du financement et du contrôle de la qualité des formations.

Grâce à ce mandat, Marie-Jocelyne a aussi « élargi son univers » en construisant des liens avec les collègues CFDT de Transition pro d’autres régions. « À la CFDT, nous avons des idées. Nous échangeons sur nos expériences, construisons des revendications communes et notre expertise est reconnue dans le domaine de la formation », précise-t-elle fièrement. Si elle n’a pas le temps de s’ennuyer, Marie-Jocelyne a néanmoins quelques idées pour la suite. Un avenir que l’habitante de Massy rêve en bord de mer. Un rêve aux airs de retour aux sources.