Carole, démocrate et pragmatique

Publié le 25/04/2023

Jeune, Carole ne supporte pas l’injustice mais ce sont les films qu’elle regarde, adolescente, qui lui permettent de mettre en mots sa pensée. Dès le début de sa vie professionnelle, elle prend la défense de ses pairs salariés. Ce qui l’amène au syndicalisme. Aujourd’hui, mandatée dans la protection sociale, elle veille à rappeler que la Sécurité sociale appartient, avant tout, aux assurés.

« Je vivais dans une cité à Romainville avec mes parents, commerçants. J’aimais beaucoup le cinéma et j’ai un souvenir marquant de FIST, le film avec Stallone sur deux manutentionnaires injustement licenciés pendant la Grande Dépression, qui se syndiquent. Ce film a cristallisé le sentiment d’injustice sociale que j’éprouvais déjà en écoutant les infos… » explique-t-elle. Diplôme de gestion en poche, elle trouve du travail, d’abord dans l’informatique puis dans le conseil, chez Arthur Andersen, devenu Accenture.

Up or Out

C’est une époque où, dans les cabinets de conseil, sévit la politique du « Up or Out » pour les consultants: gravir les échelons en atteignant des objectifs ultra-exigeants ou être remercié. Une façon, selon l’employeur, de tirer le meilleur des travailleurs, qui contribue surtout à leur faire perdre confiance en eux et conduit, finalement, à des situations de maltraitance, voire de discrimination (les femmes ou les salariés les plus âgés sont ainsi souvent écartés, NDLR). « Les consultants se sentaient obligés de travailler sans relâche. S’ils étaient licenciés, c’était leur faute: ils n’avaient pas été assez bons. J’ai très rapidement eu besoin de les soutenir et au moins de montrer à la direction qu’elle pouvait décider de se séparer d’eux mais qu’elle devait le faire proprement. »

À l’écoute des salariés

Et c’est, de fait, en montrant que Carole démontre : elle apporte des preuves concrètes à son employeur. « Il n’y avait pas d’organisation syndicale chez Arthur Andersen, une boîte en très forte expansion pourtant. Pour accompagner nos collègues, nous nous sommes présentés à deux au CE en 1996. Nous avons pu obtenir un accord sur les 35 heures en 2000, avec des conditions très favorables. Pour être crédibles, nous avions commencé par organiser une enquête auprès des salariés, qui ont majoritairement répondu qu’ils y étaient favorables ! » Carole s’aperçoit néanmoins que, pour négocier, il vaut mieux être soutenu par une organisation et se former : « J’ai alors rejoint la CFDT pour ses valeurs démocratiques et laïques. »

De la section à la CPAM

La section CFDT est ainsi créée en 2003. Carole est élue successivement CE, DP, CHSCT. « Nous avons signé beaucoup d’accords : la mutuelle/prévoyance, les astreintes, le travail du dimanche. Nous avons même empêché le déménagement du siège à Aubervilliers en montrant aux actionnaires américains que les conditions de transport et de sécurité n’étaient pas réunies. Les Américains ne rigolent pas avec ça », s’exclame-t-elle. La CFDT est aujourd’hui majoritaire chez Accenture. En 2005, Carole prend également des responsabilités dans son syndicat, le Bétor. Puis elle tombe malade et doit réduire son activité. « Quand on m’a proposé, en 2015, d’être titulaire à la Caisse primaire d’assurance maladie, j’ai pensé que mon parcours personnel pourrait m’aider à agir pour les autres. » Elle
devient cheffe de file en 2018.

La Sécu aux assurés

À la CPAM, elle examine, dans différentes commissions, les demandes d’aides individuelles pour les soins onéreux, les pénalités à l’égard de certains professionnels de santé « qui surfacturent », ou encore les recours des salariés. Depuis 2018, Carole est également titulaire à l’Agence régionale de santé (ARS). « C’est un bon moyen pour avoir une vision globale du système de santé même si c’est un millefeuille administratif. » Avec un oeil aiguisé sur la politique de santé de la région, Carole compte rempiler pour le prochain mandat, tout en restant très attachée à la vie de son syndicat. Une manière efficace d’apporter sa pierre à l’édifice de la justice sociale.