Pacte social et écologique : dans le vif des débats

Publié le 17/06/2019

Avec 18 associations et syndicats, la CFDT a publié, le 5 mars, le Pacte du pouvoir de vivre. Un appel ambitieux qui exhorte « les membres du gouvernement, les parlementaires, les élu.e.s de chaque territoire, les employeurs et les décideurs à s’engager en faveur d’un “pacte écologique et social” devenu une urgence ». L’Union territoriale interprofessionnelle (UTI) de l’Ouest francilien et le Syndicat de l’écologie et de l’équipement Île-de-France (Seerif) se sont inscrits, ensemble, dans la démarche en organisant, le 6 mai dernier, trois tables rondes.

70 militants ont participé au débat qui s’est tenu dans les locaux du ministère de la Transition écologique et solidaire à La Défense. De gauche à droite : Édouard Bouin, Olivier Clément et Vincent Pigache.

Le rôle possible de la Responsabilité sociale des entreprises (RSE) dans la transition écologique était le thème de la première table ronde. Frédérique Lellouche, secrétaire confédérale, est revenue sur l’histoire de la RSE et a regretté la vision parfois étriquée des entreprises, qui y voient encore trop souvent une simple contrainte réglementaire. « Au fil des années, avec un environnement législatif de plus en plus favorable, on a quand même gagné en transparence et les entreprises rendent davantage de comptes, précise-t-elle. Mais la transition écologique implique d’aller beaucoup plus loin et de changer la manière de penser l’entreprise. Quand la RSE sera perçue comme une véritable démarche de dialogue et de concertation des parties prenantes, et notamment des parties constituantes que sont les travailleurs, alors elle pourra être un instrument de transformation plus profond, un levier pour démocratiser l’entreprise, valoriser le travail et ainsi permettre qu’il ne soit plus seulement perçu comme une charge ».

Laure Lamoureux, déléguée syndicale centrale de l’entreprise RTE (Réseau de transport d’électricité – Énergie-Chimie), qui emploie 8 500 salariés, apporte quant à elle son expérience de négociatrice. « La proposition d’accord RSE formulée par notre direction manquait vraiment d’ambition et d’engagements nouveaux pour qu’on l’accepte », souligne-t-elle. Pour autant, des mesures intéressantes ont été prises ces dernières années, comme la démarche d’écoconception, la charte des achats responsables ou encore l’ajout de critères environnementaux dans l’accord d’intéressement (tels que la baisse de l’impression de documents).

Pour conclure cette première table ronde, Julie Quiedeville, responsable de recherche à Vigeo Eiris, présente le référentiel des 38 critères de notation environnementale, sociale et de gouvernance des entreprises développé par l’agence pour évaluer la capacité des entreprises à créer durablement de la valeur en maîtrisant leurs risques de long terme.

Fiscalité et investissement
Le thème de la fiscalité environnementale, objet de la deuxième table ronde, est introduit sous forme ludique par Éloïse Rousseau, secrétaire générale du syndicat francilien des finances. « En quelle année a été créée la première taxe écologique ? Connaissez-vous la part de la fiscalité environnementale dans le PIB français ? », interroge-t-elle. Répondant aux questions, Éloïse fait à la fois une présentation historique et politique du sujet. On apprend par exemple que la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques est la 5e recette fiscale de l’État, que la France se situe au 22e rang sur 28 dans l’UE en 2017 pour la part de la fiscalité environnementale dans le PIB, et que notre pays se distingue par sa faible capacité à taxer les transports et l’achat de véhicules.

Dans les échanges, on revient aussi sur les débats récents autour de la taxe carbone qui ont révélé que le consentement à l’impôt est d’autant plus faible quand l’affectation des ressources fiscales n’est pas claire et n’intègre pas des critères de justice sociale. « C’est pourquoi il est nécessaire de penser une fiscalité non punitive et de développer une politique sociale offensive sur les questions de logement et de transports », a plaidé Olivier Clément, secrétaire régional. Édouard Bouin de l’association Agir poPacte pouvoir de vivre cfdtur le climat, abonde dans ce sens en rappelant également les enjeux de baisse du réchauffement climatique qui nécessitent un investissement massif au niveau européen. « Nous avons besoin d’un véritable pacte européen adossé à une banque européenne d’investissement », défend-il.

Proposer et mener l’action
Puisque l’objectif, tel que présenté en début de séance par Vincent Pigache, secrétaire général de l’UTI, et Dominique Vincent, responsable du Seerif, était bel et bien de « repartir de cette rencontre avec quelques idées d’actions à mener », la matinée s’est naturellement conclue par les propositions concrètes du Pacte du pouvoir de vivre. Dans leur présentation de ce Pacte porté par 19 organisations – récemment rejointes par 23 nouvelles – Christophe Dague, secrétaire confédéral CFDT, Jean-David Abel de France Nature Environnement et Samuel Leré de la Fondation Nicolas Hulot, ont appelé les équipes syndicales du pro et de l’interpro à interpeller les décideurs publics et les employeurs et à réfléchir aux propositions qu’elles pourraient décliner localement pour construire une transition écologique qui renforce également la cohésion sociale et réduise les inégalités.

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