[Dossier] Les conseillers prud'hommes, au service de la justice sociale

Publié le 22/12/2017

Le renouvellement des conseils de prud’hommes aura lieu en janvier prochain. Celles et ceux qu’on appelle souvent les juges du travail seront nommés par l’autorité publique pour un mandat de quatre ans sur proposition des organisations syndicales de salariés et d’employeurs, à partir de leur audience. En Île-de-France, 358 militantes et militants prêteront serment au titre de la CFDT. La moitié d’entre eux pour la première fois. Regard sur ce renouvellement.

Crédit photo : Réa

Juridictions uniques en Europe, les conseils de prud’hommes sont composés paritairement de salariés et d’employeurs. Ces jugesconseillers prudhommes cfdt idf non professionnels règlent les litiges individuels liés aux contrats de travail ou d’apprentissage. Le mandat qui va débuter en 2018 fait suite au mandat 2008-2017 qui a marqué, tant par sa durée – neuf ans au lieu de cinq – que par les évolutions qui l’ont traversé. La désignation se fait dorénavant sur la base de l’audience des organisations syndicales calculée en 2017 et non plus après élection. Une stricte parité femmes/hommes est aussi exigée dans chaque conseil. Par ailleurs, le mandat est raccourci à quatre ans pour correspondre au cycle de mesure de l’audience des organisations.

UN MANDAT INTERPROFESSIONNEL
Pour ce renouvellement, la CFDT récolte les fruits de sa première place dans le privé avec un nombre de sièges en très nette progression : elle passe de 1 607 à 2 348 sièges au niveau national, soit un conseiller prud’homal sur trois. En Île-de-France, la CFDT obtient 358 sièges contre 308 précédemment, une augmentation de plus de 16%. Conséquence logique : « la CFDT en Île-de-France devrait obtenir davantagede présidences et de direction de conseils », prévoit Didier Lefèvre, secrétaire régional en charge du juridique. C’est aux unions départementales franciliennes qui organisent et animent le réseau des conseillers sur leur département que revenait l’important travail de recherche de candidats. Un mandataire de liste a été désigné dans chaque département. Un appel à candidatures a été lancé auprès des syndicats franciliens et les retours n’ont pas manqué. Il a souvent fallu faire des choix, notamment pour les sections Encadrement. Il faut souligner également que le taux de renouvellement, après un mandat de neuf ans, était particulièrement élevé : plus de la moitié des conseillers !

Pour faciliter cette organisation, l’Union régionale et l’IREFE – l’institut de formation de la CFDT Île-de-France – ont construit une préformation de deux jours autour de la « sensibilisation au mandat prud’homal », en lien avec les référents juridiques des unions départementales, pour les candidats sollicitant un premier mandat. « Une étape importante », pour Valérie Waligora, directrice de l’IREFE, qui estime que « ces formations ont permis d’apporter une vision claire du mandat et de repérer les militants motivés ».

UN CONTEXTE DE RÉFORMES
Outre les nouvelles règles de désignation, plusieurs évolutions ont marqué la période et reflètent, à plusieurs égards, un certain malaise de la justice prud’homale. La loi d’août 2015 avait comme objectif principal de faciliter l’accès à la justice et de réduire les délais. Il s’avère dans les faits qu’ elle n’ a pas, pour l’heure, apporté de solution probante à la question des délais, a parfois rendu plus complexe l’accès à la saisine, et renforcé l’importance de l’écrit dans le procès prud’homal (au détriment de l’oralité).

Les ordonnances Macron/ Pénicaud de septembre 2017 ont porté atteinte à la notion même de juge en instituant une « barémisation » des indemnités prud’homales dans le cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, remettant ainsi en question le libre jugement des conseillers prud’hommes et risquant de donner lieu à des stratégies de contournement. Il s’avère aussi que certaines mesures semblent difficilement applicables, au vu des moyens dévolus à la justice prud’homale. Les règlements intérieurs des conseils de prud’hommes ont évolué mais les changements sont pour l’heure peu perceptibles. Au-delà des textes, les conseillers prud’hommes désignés auront à agir dans ce nouveau contexte, à s’approprier les nouvelles règles et à les faire vivre, au service de l’intérêt des justiciables.

ACCOMPAGNER LES CONSEILLERS ET CRÉER DU LIEN

Le mandat de conseiller nécessite d’abord une solide formation. La CFDT Île-de-France et l’IREFE viennent ainsi de finaliser leur offre de formations juridiques, qui fait une très large part à la formation purd'homale. Un véritable cursus de formation est proposé aux conseillers, tant sur les territoires qu’au siège de l’Union régionale. « L’ enjeu était à la fois de former tous les nouveaux conseillers aux modules de base conçus par la confédération pour leur permettre de comprendre et appréhender leur rôle, se situer dans l’organisation judiciaire, et de ne pas laisser de côté les anciens en leur proposant une offre plus pointue », précise Valérie Waligora.

L’objectif est également de créer une dynamique entre anciens et nouveaux en associant des anciens à l’animation de certaines formations syndicales ou en organisant des rencontres prud’hommes grand format (250 conseillers, trois fois par an) et des journées spécifiques, par exemple sur l’actualité jurisprudentielle. Un grand rassemblement francilien aura lieu chaque année à Bierville. Pour parfaire ce parcours de formation, l’Union régionale organise, en partenariat avec l’Institut des sciences sociales du travail de l’Université de Paris I, des séminaires dédiés, avec l’apport de spécialistes en droit du travail. « De manière générale, notre objectif est de faire en sorte que les conseillers se sentent bien dans leur mandat, tout en créant une dynamique et en consolidant nos liens avec eux », soutient Didier Lefèvre.

FAIRE VIVRE LA POLITIQUE JURIDIQUE SUR LE TERRITOIRE
L’Union régionale assure également la coordination du réseau des référents juridiques des unions départementales et l’articulation avec les équipes syndicales. Elle s’inscrit dans la politique nationale de la CFDT dans ce domaine, en s’appuyant notamment sur sa participation au Conseil supérieur de la prud’homie. Au final, dans le mandat qui s’ouvre, la CFDT agira, en Île-de-France, tant au travers de ses conseillers prud’hommes que par son action au quotidien dans les territoires, pour consolider cette juridiction indispensable au service de la justice sociale à laquelle la CFDT est profondément attachée.

acteurs juridiques cfdt idf

En pièce-jointe, retrouvez l'intégralité du dossier avec trois interviews complémentaires.