Laurent, une force tranquille

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Derrière son air détaché se cache beaucoup de détermination. Une profonde aversion pour l’injustice aussi. Laurent Dantzlinger, membre du service d’ordre de la CFDT, conseiller prud’homal à Paris, ancien chauffeur de Laurent Berger, a toujours essayé d’être là où il pensait pouvoir être utile.

Au premier abord, Laurent est resté un grand gamin indiscipliné, blagueur et à fort caractère. Briard depuis plusieurs générations, il a longtemps vécu en Seine-et-Marne. « J’ai bac moins cinq, avec trois sixièmes et une défaite par KO en 3e, explique-t-il. L’école ne m’intéressait pas. Je ne supportais pas qu’on m’impose des choses. »

Touche à tout

Professionnellement, Laurent se cherche, longtemps. « J’ai été électricien, menuisier, barman, videur de boîte de nuit, agent de sécurité… » Quand il décide de se ranger, après une vie « un peu dissolue », il entre d’abord à la BNP puis crée une petite entreprise de décoration d’intérieur qui ne tient pas longtemps. « J’ai été embauché dans une boîte de traitement de documents, puis une deuxième où je me suis battu contre le non-paiement des heures sup au moment du passage aux 35 heures. J’ai très vite compris que pour défendre les salariés, il fallait un mandat. » Il adhère alors à la CFTC puis à la CFDT en 2003. « Je m’y suis tout de suite senti à l’aise et le délégué syndical m’a vite demandé de reprendre son mandat. »

Protéger et défendre

Cette année-là, en 2003, les syndicats se mobilisent contre la réforme des retraites. Le service d’ordre de la CFDT cherche à s’étoffer. Naturellement, l’ancien videur et agent de sécurité pense pouvoir être utile. « C’est comme ça que j’ai connu l’interpro », explique-t-il. Le début d’une grande aventure. Dans un contexte très tendu aussi bien en interne qu’en externe, Laurent intègre aussi le groupe de protection rapprochée de François Chérèque, secrétaire général. « Le SO, c’est beaucoup de souvenirs et de rencontres, raconte-t-il. En 2006, ça a été chaud lors du mouvement contre le contrat première embauche (CPE). Nous étions mobilisés tous les mardis pour sécuriser les cortèges étudiants et le jeudi pour nos propres manifs. »
En 2012, on lui propose de devenir le chauffeur de Laurent Berger. « Je me suis dit : je sais le faire, alors allons-y ! J’ai toujours été très à l’aise avec Laurent. C’est un fils d’ouvrier. Il a une capacité de travail et de concentration incroyables. » Une vraie complicité s’installe entre les deux hommes et ils ne ratent pas une occasion de plaisanter. « Attention ! Ce qui se dit dans la voiture reste dans la voiture ! » Le chauffeur glisse quand même l’anecdote de la partie de foot improvisée, en plein Covid, dans les couloirs déserts de la confédération avec, en guise de balle, un ballon de grossesse.

Les prud’hommes et autres mandats

Laurent n’arrête pas, entre son emploi, ses mandats en entreprise, le service d’ordre. D’autant que depuis 2009, il est aussi conseiller prud’homal à Paris, premier conseil de France, puis président d’audience. « Comme je travaillais par roulement, je faisais les audiences une semaine sur deux. » Il coordonne aussi les mandatés CFDT. Parmi ses petits plaisirs ? « Faire taire un avocat ! Plus sérieusement, nous avons l’avantage, par rapport aux magistrats, de connaître le monde du travail. C’est un mandat passionnant, même si dans la section des activités diverses, nous avons à traiter de cas très difficiles, par exemple lors de conflits avec des particuliers employeurs. »
Laurent est également assesseur au pôle social du Tribunal judiciaire, délégué de proximité CFDT à la Macif et animateur de formations à l’IREFE. Ironie du sort pour celui qui autrefois aurait pu être qualifié de « cancre » ? Pas vraiment ! « Les stagiaires sont en demande, ce qui n’est pas toujours le cas à l’école, je suis bien placé pour le savoir ! Alors j’essaye de leur faire profiter de mon vécu. »
Après 46 ans d’activité, il a décidé de « laisser la place aux jeunes » aux prud’hommes, mais continue tout le reste. Avec encore un peu de temps pour faire du développement syndical… Tous ses proches, déjà, ont fini par adhérer. Il les aura eus, d’après lui, à l’usure !

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