Nicole, le pouvoir des signes

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Dans le choix de son métier ou dans son engagement syndical, Nicole a toujours été guidée par sa passion pour la langue des signes. Membre du groupe ressources handicap de la CFDT Île-de-France, permanencière à La Défense, elle a consacré sa vie à l’accompagnement des personnes handicapées. Retour sur le parcours d’une militante qui s’engage pour donner à chacun la possibilité de prendre sa propre place.

Nicole Bunel, portrait

Nicole a grandi dans un village des Cévennes, à proximité de Saint-Hippolyte-du-Fort. Aimant la nature, la « parpaillote », comme elle aime à le dire, souhaite devenir professeure de biologie. « Je n’ai pas pu continuer mes études sans bourse, alors, à vingt ans, j’ai candidaté pour un stage à l’institut Paul Bouvier pour les jeunes sourds », confie-t-elle.
Elle y découvre la langue des signes et… c’est le choc. « En 1978, elle n’était pas autorisée dans les établissements. Les enseignants employaient des dispositifs munis de boucles mécaniques pour permettre aux enfants de s’exprimer. Alors que la langue des signes aurait été beaucoup plus efficace ! » Sa vocation est toute trouvée : Nicole décide de devenir éducatrice spécialisée.

Une communication totale

À l’école d’éducateurs spécialisés de Montpellier, on parle peu du handicap sensoriel, pas du tout des handicaps invisibles. «La surdité est le seul handicap qui se partage. Entre un sourd et une personne entendante, c’est la communication qui est entravée. C’est fragilisant des deux côtés», ajoute-t-elle. Une fois diplômée, Nicole, «prête à aller n’importe où en France», ne postule que dans les institutions pour sourds et est embauchée à l’institut Gustave Baguer à Asnières.
Peu à peu, elle devient experte de la langue des signes, une langue très étudiée aujourd’hui. «J’ai assisté à des quantités de conférences, discuté avec de nombreuses personnes, étudié les particularités de la langue, sa poésie, sa grammaire… Et même ses accents !» Dans sa pratique professionnelle, elle préconise «la communication totale, c’est-à-dire par tous les moyens, y compris le corps. C’est elle qui nous rend humains».

De l’accompagnement au syndicalisme

Son engagement la mène aussi vers la CFDT. «J’avais conscience de l’importance du droit du travail car j’étais chargée de l’insertion dans l’emploi des jeunes sourds. Grâce à un collègue, je me suis tournée vers la CFDT.»
Rapidement, elle anime sa section et développe aussi la CFDT dans les établissements publics du département. «L’institut comptait trois autres syndicats, mais la CFDT a rapidement pris le dessus. Deux élections plus tard, il y avait trente adhérents parmi la centaine d’agents et aucun autre syndicat», s’exclame-t-elle.
Comme souvent, c’est par la formation qu’elle rencontre l’interprofessionnel. Puis, lors d’une initiative de l’Union régionale, elle tombe sur le groupe ressources handicap de la CFDT Île-de-France qu’elle rejoint sans hésitation. Elle organise une permanence dédiée à La Défense et répond aux sollicitations des équipes syndicales. «Une fois par mois au moins, je prends le temps de recevoir les personnes, de les laisser parler et d’examiner leur dossier en profondeur.» Nicole s’applique aussi à répondre aux sollicitations des équipes syndicales. «Certaines personnes sont vraiment en détresse et les démarches administratives peuvent être si compliquées…»
Nicole se rappelle avoir remporté quelques victoires, avec une certaine fierté. «Il faut savoir être ferme. J’ai reçu un jour une personne sourde à qui on proposait un départ négocié. À 54 ans ! L’employeur s’est immédiatement rétracté quand nous l’avons informé que nous ne contestions pas la rupture mais que nous demandions une indemnité trois fois plus élevée.»
Aujourd’hui encore, Nicole continue d’être révoltée. «Nous fêtons cette année les 20 ans de la loi handicap de 2005. Il est vraiment temps d’accélérer les choses pour favoriser réellement l’inclusion !» Alors, avec un tel parcours, il est bien difficile de croire que la retraitée veuille vraiment raccrocher ses gants de militante. «Militante un jour, militante toujours» s’amuse-t-elle à répéter.

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